Friday, March 29, 2013

Le jour du poisson


Pour marquer ce Vendredi Saint, je réalise un Cha Xi sur le thème du poisson. Je choisis mes coupes avec motif de dragons pour rappeler le conte japonais de cette carpe qui sautait hors de l'eau afin de devenir un dragon! N'est-ce pas là une allégorie de l'homme qui aspire au divin?

Et le choix de la jarre qinghua et son oiseau 'phoenix' au milieu de tous ces poissons pourrait représenter la tentation! Le nom du thé 'Oolong concubine' est une autre tentation...

La théière lixin (forme de poire, car il n'y a pas d'Yixing en forme de pomme!) en zhuni infuse ce thé avec force et précision. Il en sort doux, sucré et pur à souhait. J'aimerais que la mort soit aussi suave que ce thé, me suis-je pris à penser... Pensée un peu noire, comme le fond de mon Cha Xi.
Mais revenons à nos poissons. Leur autre rapport au thé est leur vivacité et leur fraicheur. Un poisson est comme un thé. Il se prépare de manière délicate. Il faut qu'il soit bien cuit, mais qu'il reste rosé à l'arête. Il faut trouver le juste milieu. Chaque poisson se prépare un peu différement pour tirer le meilleur parti de son goût. Chaque thé aussi a un caractère propre et requiert une technique, une théière, une eau différente... pour bien s'exprimer.

Dans le cas de cet Oolong concubine d'hiver (2011), il s'agit surtout de faire ressortir cette douceur et la pureté d'un goût entièrement naturel. Accomplir ce petit miracle devient de plus en plus fréquent avec l'expérience.


Tuesday, March 26, 2013

The secret health benefit of good tea


The primary benefit of tea is the natural nutrients it gives to our body. Many studies show that tea's polyphenols help prevent cancer, cardiovascular diseases...

The mind also benefits from a quiet and focused tea session. This reduces stress, which can help with many psychosomatic disorders.

But there is another secondary health benefit that is seldom noticed. For me, this secret benefit has become more and more important in recent years. It is the education of my palate to natural food. As I am getting used to drink very fine, pure and natural tea, I find less and less appetite for chemically enhanced or preserved food. I cook more and more simple meals at home rather than going out or bringing a ready to eat meal home.

Thanks to my tea experience, my mouth is better aware if a food tastes natural or not. Cooking similar meals than in the local restaurants, I realize that I use less salt, less MSG... And the good part is that I like it better light and made with ingredients that I select.

Tea bags are more convenient than loose leaves, but their quality is low compared to whole leaves. I feel more and more the same way about industrial food. I even make my own soy milk now and find it tastes much more clean and good than the soy milk I used to purchase! And I drink it without sugar, of course, because this is also how I enjoy my tea!

Tea has helped me switch to more natural food not because I wanted to eat more healthy, but because I enjoy their flavors much more than artificial ones. This secondary benefit could be even more important than polyphenols'!

Friday, March 22, 2013

Jinxuan Oolong de Zhu Shan - Printemps 2013

For English, see last year's article. (Same cultivar, same origin, same season).

Cultivar: Jinxuan Oolong
Origine: Zhu Shan, comté de Nantou, Taiwan
Récolté à la main le 8 mars 2013

Testé en set de compétition. 3 grammes pendant 6 minutes.

Vue
La couleur verte fraiche des feuilles indique que cet Oolong n'est pas torréfié. Leur taille est assez grande pour une plantation de basse altitude.

 L'infusion est d'une bonne clarté et transparence. Elle oscille entre le vert et le jaune.

Odorat
Les feuilles sèches ont une odeur légèrement laiteuse (et naturelle, sans additifs). Les feuilles infusées, elles sentent plus l'herbe fraichement coupée. L'infusion a une odeur simple, un peu fleurie, herbacée et lactée. Le tout est très direct, ensoleillé et pur.

Le goût
L'infusion est surtout légère et moelleuse. Elle n'a pas la vivacité et l'énergie d'un Oolong de haute montagne, mais elle n'en reste pas moins d'une douceur agréable avec une longueur en bouche raisonnable.

Cette année, les récoltes sont plus avancées que d'habitude. Il fait beau à Taiwan depuis le Nouvel An chinois. Aussi, ce jinxuan a connu un bon ensoleillement et de longues nuits fraiches pour bien récupérer.

D'un point de vue de son process, on remarquera des bords de feuilles rougies. Ce Jinxuan a donc eu une oxydation partielle un peu plus poussée que ce qui se fait souvent. Cette oxydation et un bon séchage permet une meilleure stabilité dans le temps. Il ne perdra pas sa fraicheur si vite que cela, même si ce n'est pas un thé qu'on voudra conserver longtemps. (Le mieux est de le boire dans l'année).
Ce thé simple et sans autre prétention que d'être naturel, récolté à la main au printemps et bien fait est un bon choix d'un Oolong frais quotidien, sans cérémonie. C'est aussi un bon choix pour commencer à découvrir le 'vrai' thé artisanal, à feuilles entières.

Thursday, March 21, 2013

Une envie de printemps


 L'arrivée du printemps signale l'imminence des nouveaux arrivages de thés. Les journées de plus en plus ensoleillées réveillent aussi l'envie de renouveau et de fraicheur. Il est donc bien tentant de se ruer sur les tous premières récoltes pour en goûter les arômes les plus fins et légers.

Aussi, vous trouverez probablement paradoxal que je choisisse un thé vert Long Jing du printemps 2006 (7 ans!) pour satisfaire mon envie de printemps! (Les lecteurs les plus anciens reconnaitront peut-être la première ébauche de mon étiquette, tamponnée manuellement.)

Ce longjing, je l'ai bien conservé en minimisant l'air, mais pas au réfrégirateur. Ses feuilles ont pris des couleurs plus sombres.

Comme ce sont des feuilles de grande qualité, bien travaillées, elles gardent en elles beaucoup d'arômes exquis.
 Pour mieux en faire ressortir leur finesse et leur pureté, je les infuse dans ma théière en argent avec de l'eau de ma bouilloire en argent. Cette combinaison est ce qui produit l'infusion la plus chaude. Elle ne convient surtout aux meilleurs thés verts, car elle accentue leur qualités (et les défauts).
 L'infusion n'a plus l'éclat vert des premiers jours, mais la coupe céladon de David Louveau en rehausse la couleur. Ce longjing a su gagner en complexité, avec des arômes secondaires. Mais il a surtout gardé ses qualités d'origine: une puissance raffinée et pure. La fraicheur printanière est toujours présente, mais moins directe et plus comme un souvenir de printemps. L'ambiance n'en est que plus poétique.
Une caractéristique des grands thés est leur capacité à bien vieillir. (C'est le cas de la grande majorité de mes thés.) La recherche de la fraicheur ne doit pas se faire au détriment de la qualité. Car de nombreux thés très frais sont souvent insuffisamment séchés ; cette humidité dont ils regorgent va s'oxyder à l'air, dès l'ouverture du paquet. Cela conduit certains buveurs à hésiter à ouvrir plus d'un paquet de thé à la fois. Et, en effet, ce genre de thé frais trouvera son goût rapidement altéré avec le temps.

Mieux vaut choisir un bon thé qui sait garder ses qualités sur de nombreuses années (et en développer de nouvelles).

Monday, March 18, 2013

Sunny spring Bi Luo Chun

It was raining a little last Thursday, March 14, when I took this picture. But since Chinese New Year, the weather in northern Taiwan has been quite sunny, warm and very dry. It's a kind of weather that is more similar to April/May than March. This lack of water and relative heat has caused the leaves to grow slowly and quite big. For the harvesters, they are difficult to pick, because they have to avoid picking the leaves that are too old. Therefore, there are fewer tips this year.

Cultivar: qingxin ganzhong
Harvested by hand on March 12, 2013 (a very sunny and warm day).
Origin: San Hsia, northern Taiwan.
Process: Bi Luo Chun green tea

Filtered water boiled in a Japanese silver kettle.

Brewed simply with the bowl method. I'm using a flat and asymmetric qingbai bowl handmade by David Louveau.
Many green teas also have a tendency to have a slightly yellowish color this year (due to the heat). I was able to pick one with a nice green color instead. But the batch was small: 3 kg only.


The hot water swirls in the bowl. The leaves are like dancing as they unfurl. There is one key point to remember when regular Oolong brewers switch to green tea: use fewer leaves as you would with Oolong. With Oolong, the vessel's volume can be filled with leaves, but it shouldn't with green tea leaves.  
But when you use such a flat bowl, the temperature will drop faster, so it's possible to use slightly more leaves than in a gaiwan or teapot.
The fragrances are very fresh, part flowery part grassy. It feels like a sunny and warm spring day in the hills.
The bowl gives a mellow, round aromas that underline the sweet taste of this batch. I find it a very relaxing and calm way of preparing this tea.

The renewal of spring and Easter is approaching. The colors of this Cha Xi are colors that fit this time. We can even see a rabbit in this old qinghua waste water bowl! It's very simply drawn, round like an egg!
It doesn't try to capture the details of a rabbit, but the general idea, the essence of this cute animal with long ears. In a similar way, this San Hsia Bi Luo Chun doesn't show off a strong character, but it catches the essence of a spring green tea from Taiwan.
Cheers! 

Friday, March 15, 2013

Le Bi Luo Chun de San Hsia est là!

Récolté à la main le 12 mars 2013, c'est le premier thé du printemps 2013 que j'ai pu acquérir hier! Il a bénéficié d'un temps très sec et ensoleillé.

Thursday, March 14, 2013

When 1 tea isn't enough


Even a hardcore tea fan living in Taiwan like me doesn't have so many opportunities to brew tea in the hills of the Wenshan area. The weather is perfect: sunny, dry, and comfortably warm. So, after brewing a 2007 semi-wild Baozhong, I didn't want the pleasure to stop. 1 tea wasn't enough.

So, I changed the set-up of my Cha Xi a little bit to match a darker feeling for a tea with a darker, stronger roast.
That tea is my September 28th, 2012 'high roast' Hung Shui Oolong from Shan Lin Shi (1500 meters elevation). These leaves were roasted over charcoal fire with great skill, without burning the leaves.

The aromas from this still recent roasting are so powerful that it's best to use very few leaves in the pot. The bottom isn't filled completely, as you can see below.
A slow first pour and a long brew are the best way to start the session. The added benefit of this slow pour and brew is a very calm and peaceful mood.
What a joy! The spring water is boiling in the silver kettle over charcoal fire. It takes more time to boil than with gas, but this longer wait is just like waiting Christmas when you're a kid. This prelude adds significance and meaning to the tea. If something is too easy to achieve, it looses some of its appeal.
Brewed in the zhuni Shuiping, this Oolong releases its smooth, velvet aromas with depth and power.

The tea gives me a warm and powerful energy. It's a good fit with this still very fresh early spring morning.

Air, wood, earth, metal, water. The 5 elements truly combine in the most natural manner to give me this most pleasant and refined tea experience.

Tuesday, March 12, 2013

Un palais exigeant contre l'enfer artificiel

Cuisine chinoise maison
Pomme cannelle (naturellement sucrée)
Avec chaque nouvelle année de degustations de bons thés,  je trouve mon palais de plus en plus exigeant et critique. La cuisine locale dans les restaurants de Taiwan est rarement chère et souvent très fraiche. Cependant, j'y vais de moins en moins souvent, car la nourriture y a des goûts (et parfois des odeurs) trop intenses pour être naturelles. Elle vous laisse la langue pâteuse avec une impression sèche et désagréable dans la bouche. C'est assez semblable, à plus forte échelle, à l'arrière-goût désagréable d'un mauvais thé. Ce genre de repas crée un appel pour une boisson qui rincerait tout cela. Le pire qui puisse arriver alors est d'être servi un thé parfumé avec des addiditifs synthétiques. (C'est ce qui m'est arrivé il y a 10 jours!) Ce fut un repas dans l'enfer artificiel!

Les thés parfumés artificiellement sont malheureusement plus nombreux qu'on le croit, même à Taiwan. Une Française revenue d'une plantation du centre de l'ile m'apporta un jinxuan Oolong... parfumé au caramel, ce qui accentue son odeur de lait! Les thés rouges font aussi souvent l'objet de telles manipulations. On peut détecter ces ajouts au fait que leur forte odeur de ces thés persiste longtemps lorsque les feuilles sèches sont à l'air libre. Au goût, ils laissent rarement la bouche clean et confortable.

Sont-ils nocifs pour la santé? Comparés à des boissons gazeuses entièrement artificielles, il n'y a probablement pas de quoi fouetter un chat. (Avant de me mettre au thé, je buvas beaucoup de coca sans devenir diabétique ou obèse....)

Néanmoins, suite à mon éducation progressive du goût, je remarque une évolution vers le naturel, les plats faits maison, les fruits frais délicieux de Taiwan. Ce n'est pas tant parce qu'ils sont sensés être plus sains et plus nutritifs, mais car je remarque petit à petit qu'ils ont meilleur goût et qu'ils me donnent plus de plaisir. Et, en sens inverse, mon palais tolère de moins en moins les arômes artificiels et la cuisine industrielle.

Ainsi, grâce à un livre offert par Michel François, j'ai commencé à faire mon propre pain (de temps en temps), ainsi que la pâte à pizza. (Ci-contre, la photo de ma première fougasse!) Le petrissage manuel de la farine et de l'eau n'est pas sans m'évoquer le travail du potier, d'ailleurs!

Je commence même à faire mon lait de soja moi-même! En le comparant au lait de soja du commerce, je remarque qu'il est naturellement doux (si on le cuit bien), alors que celui que j'achetais laisse une petite amertume désagréable en bouche. Le lait de soja industriel se conserve plus longtemps, mais cela s'en ressent. Cela s'en ressent seulement si on le compare au naturel, et si on développe des papilles sensibles à ces petites variations qui font le caractère de chaque lot de thé.

Plus mon palais apprécie la finesse, le naturel du thé de qualité, plus il deviant exigeant aussi pour la cuisine. Pratiquement chaque plat, chaque ingredient aura un meilleur goût si on le fait soi-même ou si on recherche une qualité artisanale. Je l'avais déjà remarqué avec l'huile d'olive, mais c'est vrai pour presque tout! Mais cette demarche n'est pas aveugle. Comme avec le thé, il ne s'agit pas de se fier aux étiquettes et aux mots, mais de faire confiance à son nez et son palais!
Tarte aux pommes alsacienne
Et n'oubliez pas de faire du sport régulièrement!

Monday, March 11, 2013

Brewing advice


I usually brew tea for the guests I meet the first time. It's probably interesting and useful for them to see how I perform my tea. But after a while, I also like to reverse the roles and see my guests brew. That's what I did last week with M.

He has a martial arts background that gives him a strong and peaceful presence. I was very impressed by the calm and concentration he had during the whole brewing, starting from the pre-heating to the drinking.
He brewed both winter 2012 Hung Shui Oolongs from Shan Lin Shi. Thanks to my familiarity with the teas and my prolonged education, I knew how the tea would taste just from looking at his process. It felt like seeing 1 + 1 and concluding 2. Before receiving the first cup, I knew the tea would be too light, and that the leaves hadn't fully opened in the gaiwan.

When I'm brewing by myself, I am too absorbed by my movements and my routine to notice my own mistakes with the same ease. (And I'm still far from perfect!) But being on the outside and watching somebody else brew is much easier.

Therefore, one way you can improve is to record yourself with a video camera to see yourself when brewing tea. And if you have trouble brewing one of my teas, I would gladly review 1 video of you brewing one of my tea, so that I can tell you what you are doing wrong and how you can improve. The easiest way would be to post it on Youtube and send me your link. (I will also continue to make videos to show you my technique. Update: here is my Youtube channel to see them.)
M's second cup was much more concentrated and full of delicious aromas after I told him which points to pay more attention to!

Thursday, March 07, 2013

Cultiver l'art du Wenshan Baozhong

 Une journée de printemps précoce me permet de réaliser un petit rêve: un Cha Xi traditionnel dans les montagnes de Wenshan, entre les plantations de Baozhong. Wenshan signifie littéralement 'culture montagne' en chinois. Raison de plus pour préparer mon thé avec ce qui me reste après avoir tout oublié! Il s'agit donc de vraiment mettre en pratique mon gongfu, les connaissances que j'ai intériorisées et faites miennes.
L'endroit est magnifique. Un grand rocher fait office de table et des rocs plus petits servent de banc! Les montagnes ont toujours été des endroits spirituels en Chine. Cela avait une raison pratique au depart: les terrains montagneux ne valaient rien, car l'agriculture y était plus bien plus difficile qu'en plaine. De plus, les monastères y échappaient ainsi aux impôts.
 Loin de la grande ville, l'esprit y trouve calme, beauté et paix. Les conditions pour un excellent thé sont réunis.
 Je transforme la ceinture de kimono en un triangle, épousant un peu la forme du rocher. J'y vois la notion d'espace et de son aménagement. Pour quelques heures, cet espace devient le mien et je l'organise de manière esthétique et pratique (comme un mandala).

La lumière matinale, cette atmosphere claire et fraiche promettent une énergie radieuse. L'esprit creatif (du dragon) se reveille pour disposer chaque accessoire à sa bonne place. Le tout ne demande qu'à être photographié et partagé!

Les préliminaires sont toujours fondamentales. La preparation du thé devient un succès si la relation entre chaque accessoire et le thé a été bien pensé, anticipé.

Je ne lésine donc pas sur la qualité de mon matériel ce jour-là, à commencer par cette théière Shuiping en zhuni.

Pour l'harmonie avec ce lieu, je choisis un Wenshan Baozhong assez particulier. Il s'agit d'une récolte semi-sauvage du printemps 2007 que le fermier avait torréfié légèrement en septembre de cette année. Le dernier paquet vieillit depuis chez moi, en sachet plastique. C'est pourquoi je l'entrepose quelques minutes dans la nouvelle jarre de David Louveau avant de le mettre sur une vieille petite coupelle qingbai.
L'eau de source chauffe doucement dans une bouilloire en argent au-dessus d'un lit de charbons incandescents. Le temps s'écoule au rythme de ce feu et de l'ébullition de l'eau.
Les arômes de ce Baozhong sont encore mielleux et forestiers, mais on sent aussi une transformation vers plus de fruité et de velouté. Avec le temps, il est normal que ce thé naturel perde en force, en intensité ; par contre, il y gagne en finesse, en harmonie.
L'infusion est transparente et resplendissante dans les coupes 'dragon' de De Hua.
En contraste, le bol à eaux usées est tel un trou noir!
Ce Cha Xi s'achève bien trop rapidement... Savourons chaque instant et chaque coupe de thé!